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Stupor Mundi, Néjib, Gallimard jeunesse, 288 pages
Stupor Mundi, Néjib, Gallimard jeunesse, 288 pages
Stupor Mundi, Néjib, Gallimard jeunesse, 288 pages, 26 €

BD
Images lointaines

Gilles Bechet -

C’est un bien étrange équipage qui débarque sur une plage des Pouilles à l’issue d’un long voyage. Elle est menée par Maître Hannibal Qassim El Battouti, illustre scientifique chassé de Bagdad par une fatwa contre les savants impies. Avec lui, Houda, sa fille impotente mais très délurée arnachée sur le ventre de El Ghoul, son serviteur masqué. Ils viennent trouver refuge dans l’imposant château forteresse où l’empereur Frédéric II, surnommé Stupor Mundi, accueille quelques uns des plus brillants esprits scientifiques et artistiques de l’époque.

 

Invention extraordinaire

 

À l’abri de ces hauts murs, Hannibal s’est donné une mission: achever Beït el Dhaw, la boîte à lumière, une invention extraordinaire qu’il n’avait pas pu mettre en œuvre dans le palais du calife. Une machine à faire des images à partir de la lumière. « Ça ne sert à rien » tonnent déjà certains conseillers, mais qu’importe, Stupor Mundi est attendu pour assister au prodige. Cette course contre la montre scientifique se double d’une autre plus introspective chez Houda qui essaie de se souvenir des événements dramatiques dans lesquels sa mère est morte et où elle a perdu l’usage de ses jambes.

Subtilité et fantaisie

 

Graphiste et illustrateur jeunesse français, Néjib signe ici sa deuxième B.D. après Haddon Hall, un premier récit très réussi qui racontait les débuts artistiques de Bowie dans le Londres psychédélique des sixties. Avec Stupor Mundi, il nous ramène au XIIe siècle, une époque de basculement à la fois lointaine et proche de nos doutes d’aujourd’hui.

Bien des thèmes nous semblent étrangement familiers; l’Orient déjà tellement étranger, le conflit entre foi et raison, jusqu’aux mystifications et au détournement des sciences à des fins politiques. Inspirée d’une réalité historique, cette B.D. est un vrai régal de subtilité et de fantaisie. Par ses personnages d’abord attachants et fantasques, par une narration pleine de surprises mais sans fioritures. Par son graphisme épuré enfin. Les fins traits subtilement complétés par des aplats de noir ou de couleur flirtent parfois avec l’expressionnisme, tout en alliant simplicité et expression. Et si les images ont une utilité conclut Hannibal, c’est bien de se souvenir des belles choses.

 

Stupor Mundi, Néjib, Gallimard jeunesse, 288 pages, 26 €

Disponible sur BAZAR e-SHOP