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La République du catch, Nicolas de Crécy, Casterman, 220 pages, 22 euros
La République du catch, Nicolas de Crécy
La République du catch, Nicolas de Crécy

BD
Combat pour la vie

Gilles Bechet -

Il est grotesque et tendre, l’univers de Nicolas de Crécy. Pour son retour à la B.D., il nous emmène dans une ville tentaculaire comme il les aime, avec ses personnages au cœur pur, étouffés par les sombres desseins d’ignobles brutes. Dans un récit qui mêle roman noir, histoire d’amour et anticipation rétro-futuriste, on fait la connaissance du petit Mario aux grandes lunettes qui vend des pianos bien qu’il soit piètre musicien. Heureusement, il peut compter sur un palmipède aussi virtuose que muet pour faire jaillir les notes du sombre instrument laqué. Tout cela n’est pas du goût des cupides malfrats qui rançonnent la ville avec l’aide des gros bras d’une bande de catcheurs fidèles.

Une scène improbable

C’est un peu de douceur dans un monde de brutes, la revanche de la faiblesse contre la force. Aux côtés de Mario, une belle bande d’improbables fantômes, de ratés rigolards qui n’ont peur de rien. Un cycliste sans vélo aux interminables bras tout mous, une perruque faite avec les cheveux des plus misérables humains et un fantôme qui cache une fragile princesse aux mille maladies. Dans une scène improbable qui résume bien l’album, on voit Enzo, le bébé mafieux, attendre avec ses séides son adversaire à qui il a donné rendez-vous dans une casse automobile. Et voilà qu’arrive Mario, seul sur un petit vélo à trois roues. En unissant leurs efforts, ces ratés que le monde ne veut plus voir peuvent retourner la force des dominants contre eux. Nicolas de Crécy met son dessin nerveux et son goût pour les architectures baroques au service d’un récit trépidant d’une grande inventivité narrative.

Une B.D. pas si nipponne

La République de catch est un projet particulier pour de Crécy. Conçu pour un éditeur japonais et prépublié par épisodes dans une revue de mangas, le récit s’est plié au rythme et au format des B.D. nippones sans rien céder sur sa personnalité propre. Sans chercher à singer les mangas, l’auteur s’est imprégné de la culture des fantômes propre à la mythologie japonaise et de la fluidité dynamique du récit. Comme le veut la logique éditoriale de l’archipel, l’histoire qui se termine sur une fin ouverte aura une suite si le public en redemande.

 

La République du catch, Nicolas de Crécy, Casterman, 220 pages, 20 €

Disponible sur BAZAR e-SHOP