Chaque semaine, Anouk Van Gestel repère le meilleur des sorties littéraires, relie les genres, réveille les classiques oubliés, partage ses trouvailles insolites et ses rencontres d’auteurs, d’ici ou d’ailleurs.
Natacha Appanah
Tropique de la violence
Direction Mayotte. L’île française dans l’Océan indien et département le plus pauvre du pays. Le seuil de pauvreté touche quasi toute la population. Les enfants errent dans les rues et tentent de survivre. Moïse, un petit métis abandonné par sa mère sans-papiers, est recueilli par une infirmière. A sa mort, il a quinze ans et se retrouve livré à lui-même. Il croise la route de Bruce, chef d’un gang, cette rencontre le fait plonger dans une spirale infernale de violence.
L’extrait
« Oh, après tout, ce n’est peut-être qu’une vieille histoire, cent fois entendue, cent fois ressassée. L’histoire d’un pays qui brille de mille feux et que tout le monde veut rejoindre. Il y a des mots pour ça eldorado, mirage, paradis, chimère, utopie, Lampedusa. C’est l’histoire de ces bateaux qu’on appelle ici kwassas kwassa, ailleurs barque ou pirogue ou navire, et qui existent depuis la nuit des temps pour faire traverser les hommes pour ou contre leur gré. C’est l’histoire de ces êtres humains qui se retrouvent sur ces bateaux et on leur a donné de ces noms à ces gens-là, depuis la nuit des temps : esclaves, engagés, pestiférés, bagnards, rapatriés, Juifs, boat people, réfugiés, sans-papiers, clandestins. »
Pourquoi le lire ?
Pour la meilleure raison qui soit : il est impossible à lâcher ! Chaque page de ce roman choral est un vrai plaisir de lecture. Direction Mayotte, où derrière les plages de carte postale se cachent la misère, la violence et le désespoir. Certains passages, bouleversants, invitent à réfléchir sur l’exil et la pauvreté, et sur leurs conséquences. Disponible en format poche, Tropique de la violence offre une plongée intense dans l’univers sans concessions de Natacha Appanah, autrice et journaliste mauricienne. Nommée pour plusieurs prix avec La Nuit au cœur, son dernier roman, elle confirme une fois encore son talent. Si j’étais membre d’un jury, mon choix serait déjà fait.
Tropique de la violence, Natacha Appanah, Folio n° 6481. 7,50 Euros. https://www.facebook.com/editionsfolio/?locale=fr_FR
La nuit au coeur https://www.facebook.com/gallimard/?locale=fr_FR