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Evence
12 fleurs du mal, cover (c) Soond / Claude Evence

CD
Claude Evence
chante les fleurs du mal

Gilles Bechet -

Jazzman multi-instrumentiste, Claude Evence  peut aussi se faire chanteur à ses heures. Et quand il met en musique Les fleurs du mal de Baudelaire, il en fait un étonnant bouquet de mélodies et de chansons qui emmènent le dandy poète là où on ne l’attendait pas.

 

 

Miel particulier

L’albatros, ce grand oiseau roi de l’azur, humilié par les marins sur les ponts des navires, ou L’invitation au voyage (Là, tout n’est qu’ordre et beauté, Luxe, calme et volupté) sont des quelques-uns des poèmes qui composent Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire. Cette oeuvre flamboyante et visionnaire est devenue un classique qui souffre parfois, comme tous les chefs d’oeuvres, d’un excès de vénération et de mise sous cloche muséale. Il faut croire que cette oeuvre distille un miel particulier pour les oreilles car dès leur publication les Fleurs du mal ont séduit des musiciens et non des moindres (Gabriel Fauré, Claude Debussy, Alban Berg) et plus tard des chanteurs comme Léo Ferré, Serge Gainsbourg, Jean-Louis Murat et même Mylène Farmer).A cette longue liste vient s’ajouter Claude Evence qui salue le bicenteniaire du poète par sa mise en chansons des Fleurs du mal.

Souffleur éclectique

De ces 168 poèmes, Claude Evence en a retenu douze pour leur musicalité et leurs mélodies intérieures. Il ne lui restait plus qu’à les faire chanter.
Claude Evence, jazzman et souffleur éclectique, s’est illustré dans de nombreux projets dont on retiendra, parmi les plus récents, les Close Up 5 et CLEVJA chroniqués à cette adresse.

Réalisé en confinement 12 fleurs du mal est un vrai album solo. Non seulement Claude Evence y chante, mais il joue de tous les instruments (saxophone, clarinette basse, clarinette alto, trombone, bugle et trompette, ainsi que des guitares et synthés).

Luxe, calme et volupté

Ce voyage musical avec le dandy du spleen est d’une grande diversité. On y passe du reggae, à la pavane ou la bourrée. Sans que jamais cela ne semble forcé ou incongru. Ciel brouillé s’ouvre avec un rythme reggae et une basse ronflante. Claude Evence en profite pour glisser quelque petits solos, ici de buggle, là de tuba pour faire décoller la chanson sous d’autres cieux. Avec Le serpent qui danse, la chanson flotte sur des nappes de claviers minimalistes et répétitifs. Vocaliste plus que chanteur, il ne force pas sa voix pour se mettre au service de la mélodie sans chercher à en faire de tonnes. Un fantôme a des échos prog rock martial, agrémenté de quelques dentelles à six cordes. Rêve parisien, plus parlé que chanté, se déroule sur un twist mutant dans une ambiance tropicalia. Je suis de mon coeur le vampire Un de ces grands abandonnés chante-t-il sur l’héautontimorouménos, complainte spatiale baladant son spleen entre planètes et astéroides.
Dans La mort des amants battent Nos deux coeurs seront deux vastes flambeaux, Qui réfléchiront leurs doubles lumières Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux.
L’invitation au voyage se balance sur un rythme indolent d’une moite volupté. La beauté est à portée d’oreille.
Dans le lugubre poème Chant d’automne, Baudelaire cherche la beauté dans la lumière verdâtre des longs yeux de sa muse, Claude Evence l’a posé sur une marche solennelle.
Au final, 12 fleurs du mal est un album agréable à écouter et fredonner qui fait oublier tout ce qu’on croyait savoir sur le poète parisien (et brièvement bruxellois) pour faire découvrir des textes d’une sensualité et d’une force jamais démodées

 

12 fleurs du mal, Claude Evence, CD Soond, 12 titres, 53 minutes

 

Disponible  sur BAZAR e-SHOP

 

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