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The Circus 1870-1950s, 888 pages, textes trilingues, 14,99 €

DES ÉTOILES DANS LES YEUX

Gilles Bechet -

On ouvre ce livre comme on écarte le lourd rideau du grand chapiteau, et on se plonge dans un monde révolu. Celui de la grande époque du cirque à l’ancienne avec les girls, les clowns, les animaux, les trapézistes, acrobates et les phénomènes. Plus de 600 photos et gravures racontent près d’un siècle d’histoire du cirque sur la piste et en coulisses. Dans son âge d’or, le cirque américain était le plus important spectacle de divertissement du moment. Une machine à rêve bien huilée. C’était à la fois le Super Bowl, les jeux olympiques et le dernier succès d’Hollywood livré à domicile. Une ville itinérante de 1600 habitants avec ses stars, ses aspirants vedettes et ses travailleurs de l’ombre qui voyageaient par route, par train, jusque dans les plus petites villes du vaste territoire américain. Le public venait y chercher l’illusion, l’effroi, le risque, la magie, et l’excentricité qu’il n’aurait jamais toléré en d’autres lieux.

Les récits d’explorateurs

Le cirque ne vient pas de nulle part, ses origines remontent aux lutteurs de l’antiquité, aux bateleurs du moyen-age, aux acrobates de la Renaissance, ainsi qu’au music-hall de la Belle Epoque. Ces gens qui ne voyageaient jamais, découvraient pour la première fois les ménageries d’animaux sauvages et exotiques évoqués par les récits des explorateurs, des premiers colons ou les films de Tarzan. Il y avait aussi ces populations indigènes, contorsionnistes asiatiques, femmes au cou de girafe, ou sauvages aux lèvres à plateau. Dans le rapport au public, on n’est pas très loin de la curiosité malsaine mise à l’œuvre dans les zoos humains, même si les conditions de vie des « indigènes » étaient nettement meilleures.

Une vie sans contraintes

Car ce monde à part qu’était le cirque formait une famille, avec ses castes et ses préférences, certes, mais bien affranchies des contraintes sociales et morales du monde sédentaire. C’était particulièrement vrai pour les femmes qui se faisaient admirer pour leurs exploits autant que pour leur physique. Les tenues glamour avaient tout ce qu’il faut pour titiller les hommes et faire rêver les filles d’une vie sans contrainte. Le prix de cette liberté était un certain inconfort où chacun devait se contenter de deux seaux d’eau par jour pour les ablutions et toilettes.
Le cirque américain ne serait pas le cirque sans son sideshow ou galerie des phénomènes où se donnaient rendez-vous les siamoises, les femmes à barbe ou autres hommes tronc et hommes poissons.

Des sensations, de la nouveauté

Le cirque est évidemment aussi le lieu de l’exploit physique et des cascades à couper le souffle. Des femmes obus, funambules à bicyclette, aux doubles sauts périlleux en automobile ou à l’improbable descente d’escalier sur la tête, parfois même coiffé de patins à roulettes, le public voulait des sensations, de la nouveauté. L’inventivité des artistes de cirque était sans bornes, mais ceux des illustrateurs et affichistes également. Bien de ces attractions ont passé de mode, mais le cirque est toujours là. Il a bien changé mais le goût de la performance, le frisson du danger en haut des agrès n’a rien perdu de son intensité.

The Circus 1870-1950s, 888 pages, textes trilingues, 14,99€