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how it will end
Mounira Al Sohl, Lackadaisical Sunset to sunset, 2021, (C) l'artiste et la Fondation Boghossian
how will it end
Lamia Ziadé, Illustration de "Mon port de Beyrouth" (éditions P.O.L. 2021), 2020
how it will end
Ali Cherri, Staring at a Thousand Splendid Suns, 2021, courtoisie de l'artiste et de la Fondation Boghossian
how will it end
Christine Safa, L'impression du soleil - Toutes les pierres sont chaudes , 2020, courtoisie de l'artiste

Expo
Au Liban, et après ?

Gilles Bechet -

La Villa Empain a rassemblé une quarantaine d’artistes de la scène contemporaine libanaise.
Par leurs créations ils traduisent leur réactions, leurs émotions et leurs espoirs face à la crise sans fin que traverse leur pays.

 

Comme attirés dans un puits sans fin, les Libanais et les Beyrouthins vivent depuis quelques années une succession de tragédies et d’épreuves qui ont culminé avec la dramatique explosion du 4 août 2020 qui a ravagé le port de Beyrouth et meurtri toute la ville.

L’art n’est pas séparé de la vie

Déjà très présente aux côtés de la population libanaise, la Fondation Boghossian a voulu agir également avec une exposition qui rassemble une quarantaine d’artistes de différentes générations, résidant sur place ou à l’étranger. « Nous n’avons pas voulu faire une exposition mortifère » avance Louma Salamé, directrice de la Fondation Boghossian et co-curatrice de l’exposition, « mais souligner que l’art n’est pas séparé de la vie. Dans ses malheurs et dans les bonheurs. Touchés au même titre que le reste de la population, les artistes étaient partagés entre l’envie de continuer leur travail et la nécessité de digérer ce qui s’est passé. »
L’exposition se partage entre les témoignages directs de ce qui s’est passé ou pourra se passer ou dans l’immersion de certains artistes dans une pratique qui reflète indirectement l’état d’esprit d’une population.

La résilience de la culture

Dans une peinture puissante, Ayman Baalbaki évoque le coeur de l’explosion dans des masses de couleurs brutes parcourues d’une vibration tactile. Dans ses lumineux et délicats portraits à l’aquarelle de victimes ou de héros de l’explosion, Lamia Ziadé convoque les couleurs de la vie teintées de l’éclat de la nostalgie. Dans leur installation photo et video Charbel Alkhoury et Monica Basbous mettent en avant la solidarité qui s’est répandue à travers toutes les strates humaines de la ville. En plaçant côte à côte les images de manifestation, des jeux vidéos de combat en ligne et les messages d’entraide et de vigilance que s’échangent ces mêmes joueurs, le duo d’artistes se jouent des apparences et de bien des préjugés. Pendant les manifestations d’octobre 2019, Abed Al Kadiri sortait dans la rue et réalisait chaque jour un dessin pour témoigner de la résistance de la population. Il a fait de même après l’explosion pour capter à l’encre de Chine sur papier de riz l’onde de choc qui parcourait la ville. Le musée Sursock, ancien palais largement détruit par la déflagration, abrite la toile Hercule et Omphale attribuée à Artemisia Gentileschi. Gregory Buchakjian en dresse un fascinant portrait collage qui est un bel hommage à la résilience de la culture autant qu’à sa fragilité.

Le bonheur de l’instant

Devant le paysage dévasté de sa ville, Omar Fakhoury s’est brièvement demandé ce qu’il allait pouvoir peindre en dehors de la désolation mortifère. En voyant une plante de maïs émerger, solitaire, des gravats des décombres, il a sorti ses pinceaux. Dans sa vidéo, Before Tomorrow was not Today, Marwan Moujaes a filmé les feux d’artifices de la nuit du Saint Sylvestre qu’il restitue en sens inverse offrant un troublant parallèle avec les déluges de bombes associée à la région. Mireille Kassar a filmé des adolescents qui se baignant sur une plage publique de Beyrouth. Dans le scintillement de la mer et les caresses des vagues, c’est le bonheur de l’instant toujours recommencé.
Le Liban est aussi une terre de lumière et de soleil comme s’en rappelle Christine Safa depuis Paris dans une peinture sensuelle et poétique mise en dialogue avec les peintures qu’une autre libanaise en exil, Etel Adnan a posées dans son appartement de San Francisco.
Avec leurs armes, avec leurs visions et avec leurs images, les artistes libanais rassemblés dans cette exposition nous rappelle que la question qui importe face à des épreuves n’est pas leur fin mais plutôt leur pouvoir de transformation.

 

How it will end ?
Fondation Boghossian
Villa Empain
jusqu’au 2 février 2022

 

67 Avenue Franklin Roosevelt
1050 Bruxelles
Ouvert du mardi au dimanche, de 11h00 à 18h00
www.villaempain.com

 

Louma Salamé et six artistes libanais racontent l’exposition How will it end? et leurs œuvres au fil d’une série de podcasts en français, anglais et arabe à écouter ici.