Bienvenue dans les coulisses de la Cambre Mode(s). En exclusivité pour Bazar, Tony Delcampe, nous ouvre les portes de sa classe et lève le voile sur les méandres de la créativité, de la pédagogie, du talent. Episode #1: travaux de rentrée.
Tout au long de l’année, mois après mois, à chaque étape clé de la création, Tony Delcampe, leader mode emblématique emmène Bazar dans les coulisses de son atelier et de ses classes, au coeur même de l’apprentissage de la création. Comment définit-il son propre rôle?
Je suis le professeur responsable de l’atelier. Plus concrètement, je suis le garant de la pédagogie mise en place. Mon rôle est de coordonner l’ensemble de l’atelier au niveau des différents professeurs-intervenants ainsi que des étudiants. Principalement, je dirige les projets de la dernière année comme professeur et suit toutes les remises de projets et jurys des quatre premières années. Pour la partie visible de La Cambre | Mode(s), je suis aussi en charge de l’organisation pratique, créative et financière du Show.
Chaque année, début juin, c’est la partie visible d’une année de création qui est présentée au public. Journalistes de mode, acteurs du monde artistique, famille et anciens étudiants se pressent au front row pour découvrir les créations des étudiants, lors du célèbre Show. Mais, avant cette mise en lumière sur le catwalk, un travail immense, des heures d’assemblages, de recherches sont accomplis par les étudiants. La formation académique de qualité de La Cambre | Mode(s) se déroule en 5 ans. Chaque année, une spécificité abordée de manière pédagogique et didactique. Cours théoriques et ateliers s’enchaînent, pour terminer en apothéose lors du Show.
En première, le point de départ du travail demandé par l’équipe des professeurs est un corps hybride. Un exercice périlleux mais nécessaire à l’étudiant pour qu’il comprenne le corps comme un volume. Quand ils arrivent, explique Tony Delcampe, ils pensent que les vêtements sont en deux dimensions, comme dans les magazines. Il faut leur apprendre ce qu’est un corps et comment l’habiller, poursuit Solange Thiry, professeur de création. L’apprentissage est total, entre la pratique, la théorie et la dimension artistique, c’est un 360° de la création mode. Dès le début, les étudiants sont lancés dans une course contre la montre, des deadlines essentiels pour aborder le métier. Le but est d’acquérir un rythme de travail tout de suite, être dans le concret. Au début de ce premier exercice, il n’y a que du papier et des constructions de formes sans aucune matière textile.
L’intitulé de l’exercice qui va occuper les étudiants jusqu’à la fin du mois d’octobre est conceptuel mais pragmatique. Il s’agit de créer un corps hybride, une chemise pour le corps. Une fusion entre la structure squelette de la chemise et d’un corps volume. La première étape: créer la pièce en papier, assembler les différentes composantes avant de la concrétiser plus tard en popeline blanche. Matière qui sera ensuite décorée d’un graphisme issu d’une recherche sur le tartan (à suivre dans l’Episode n° 2). Pour inspirer ce premier exercice de l’année, les professeurs ont emmené la classe à la section aviation du Musée Royal de l’Armée et de l’Histoire Militaire de Bruxelles. Là où les coques des zincs se combinent et s’articulent dans une précision sans faille.
Parmi la vingtaine d’étudiants occupés à assembler, combiner, chercher, Maria Cubillos. Elle explique que cet exercice lui semble simple, qu’il suffit de cranter et insérer des volumes pour acquérir de nouvelles formes, pour obtenir une création en 3D. Le thème de l’avion est très inspirant, j’ai travaillé de manière intuitive pour construire mes modèles, explique Maria. Les consignes sont strictes, la démarche semble paradoxale pour une école créative mais donner un ingrédient et une même idée de départ à tous les rend encore plus créatifs, souligne Solange Thiry.
Après avoir dessiné les modules inspirés par les coques d’avions, construit des volumes en papier, la troisième étape, plus théorique, consiste à étudier les composantes et codes de la chemise. Ensuite, les modules sont exagérés, transformés, presque malaxés pour acquérir le volume, la forme, le résultat voulu. L’objectif à atteindre? Une chemise de popeline blanche avec un graphisme personnalisé, à présenter aux professeurs, portée sur une mannequine, à la fin du mois d’octobre.
La suite au prochain épisode en novembre…
Vers les autres épisodes: Episode 2, Création du tartan graphique sur la chemise et Episode 3, Evaluation des projets