Entre les lignes

Claude Evence -

Ecouter la musique de Jean-Philippe Collard-Neven, c’est vivre une expérience qui ne relève à proprement parler ni du jazz, ni de la musique classique, ni de la chanson ; c’est tout simplement découvrir un univers sans frontières, sans exclusives, sans dogme.
 
Ecouter la musique de Jean-Philippe Collard-Neven, c’est aussi bien s’asseoir dans le salon de Debussy pendant qu’il compose « La cathédrale engloutie » que s’installer dans le studio de cinéma où Vladimir Cosma enregistre la musique des « Compères». Si des partitions existent bel et bien, afin que d’autres puissent jouer ses opus, elles ne sont parfois que l’image d’une élaboration live sur le clavier du piano, au terme d’aventureuses improvisations. La capacité à créer dans l’instant, à inventer sans préméditation, fascine chez cet artiste qui fait jaillir de la musique de son piano comme si la technique était une question sans importance. Mais ce jaillissement, de quelle source provient-il ?
 
Jean-Philippe s’en explique de la manière la plus simple, lorsqu’il parle de ce qui a inspiré un de ses albums, « Between the lines ». C’est la musique qui me traverse lorsque je regarde par la vitre d’un train, quand je marche dans la rue, quand je vois défiler sous mes yeux le film d’une vie dont inconsciemment, je compose la musique originale. Elle évoque un monde où Schubert, Ennio Morricone, Ravel, Barbara, Queen et Divine Comedy mangent à la même table. Et de fait, la musique de Jean-Philippe Collard-Neven se situe entre les genres, entres les styles. Elle ne s’inscrit pas dans une ligne unique mais entre plusieurs et c’est la raison pour laquelle on l’écoute… entre les lignes.
D’un point de vue carriériste, la voie qu’il a choisie n’est sans doute pas la plus évidente : le public aime cataloguer et lorsqu’on n’est ni un compositeur catégorisé jazz, ni un interprète étiqueté classique, ni un créateur classé contemporain, mais tout cela à la fois, les pistes d’identification sont en quelque sorte brouillées. Jean-Philippe ne changera pas pour autant son fusil d’épaule. On le verra donc dans les mois prochains jouer du tango argentin avec notre baryton national José van Dam, du jazz avec le fleuron du jazz franco-belge ou encore un concerto contemporain avec le Brussels Philharmonics dans la salle de Bozar. Entretemps, il aura été artiste en résidence à Marciac (haut lieu du jazz, célèbre pour son festival), aura fait alliance transatlantique avec deux musiciens québécois, se sera produit dans une (des) pièce(s) de théâtre dont il a écrit la musique, « Mais il n’y a rien de beau ici… », un spectacle qui fait grande place à des photos signées… Jean-Philippe Collard-Neven.
Photographedu quotidien
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Ajoutons à ce portrait une brève discographie (en se limitant aux albums dont Jean-Philippe Collard-Neven est compositeur ou cocompositeur) : « Regency’s nights », « Second move », « Between the lines », « Incidental music », « Fleeting music », « Braining storm » (et d’autres dont la sortie est proche – tous disponibles sous forme de CD ou de fichiers téléchargeables, via les grandes plateformes web). Bon appétit à la table de Jean-Philippe. Vous ne manquerez pas d’y rencontrer Georges (Delerue), Freddy (Mercury), Nino (Rota) ou Francis (Poulenc), ressuscités sous ses doigts… ou alors Barbara.