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Papa Zoglu © Simon Spruyt
Papa Zoglu © Simon Spruyt
Papa Zoglu © Simon Spruyt/même pas mal

BD
AMOURS VACHE

Gilles Bechet -

Tout commence comme dans un livre d’heures et un royaume très très lointain dans le temps. Il est question d’un prince qui a fait fortune dans le bétail, de son épouse malheureusement stérile et d’une vieille femme aux pouvoirs extraordinaires. Il serait dommage de dévoiler plus avant l’intrigue; on dira juste qu’il est aussi question d’un jeune garçon qui apprend à sept ans que sa mère biologique est une vache. Encaissant le choc, il décide de partir à sa recherche, disposant, il faut bien le dire, d’indications assez ténues. Parce qu’en dehors de son appartenance à la race bovine, il ne sait pas à quoi ressemble l’auteure de ses jours.

Complètement barré

Simon Spruyt est un des auteurs à suivre de cette jeune BD flamande iconoclaste et inventive. On avait beaucoup aimé Junker, paru en 2015. Papa Zoglu explore un tout autre registre. L’histoire tient du conte moyen-âgeux complètement barré. Respectant les consignes qu’il s’est fixées, Simon Spruyt raconte son histoire à la manière d’un récit enluminé qu’il dynamite de son humour non-sens. Son dessin est à l’avenant. Exécuté à l’aquarelle en couleurs directes, il tient autant des miniatures occidentales que persanes. Guidé par sa fantaisie graphique, l’auteur manie les couleurs en virtuose. Multipliant les petit détails, il se permet des grandes compositions sur toute la page et à d’autres moments des cases en strip pour faire avancer son histoire.

Parabole bovine

Derrière la grande fantaisie du récit, Simon Spruyt distille aussi une leçon d’ouverture à la différence. Dans sa quête maternelle, Zoglu, notre héros, rencontre une galerie de personnages loufoques, parmi lesquels un couple de chevaliers teutoniques en salopette et culotte de cuir, une femme à barbe et un enfant triton, des marginaux mis au ban de la de la société. Dans sa fantaisie, Spruyt se permet tout ce dont il a envie, une scène de possession aux accents gospel et un chapitre entièrement muet illustrant une parabole bovine. Et par un habile retournement, il clôture son récit avec d’autres personnages en quête de leurs géniteurs. Et qui doit se retrouver se retrouve.
Bien sûr, s’il y a bien une leçon à retenir, c’est que la magie n’existe pas. Mais après ça, libre d’y croire ou pas.

Papa Zoglu, Simon Spruyt, Editions Même pas mal, 96 pages couleur, 22 euros