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Et les vivants autour, Barbara Abel, Belfond Editions, 19 €.

Des livres &+
Un cafe latte
avec Barbara Abel

Anouk Van Gestel -

Chaque vendredi, Anouk Van Gestel repère le meilleur des sorties littéraires, relie les genres,  réveille les classiques oubliés, partage ses trouvailles insolites et ses rencontres d’auteurs, d’ici ou d’ailleurs.

Barbara Abel, surnommée la reine du thriller belge, rayonne d’un charisme naturel. Modeste, calme, à l’écoute, on est loin de se douter que derrière tant de grâce se cache un esprit redoutable, capable d’imaginer des histoires à faire trembler dans las chaumières. Barbara Abel réagit à trois phrases tirées de son dernier roman Et les vivants autour, en savourant un café latte parfait.

 

Elle s’était juste endormie au volant. Pour ne jamais se réveiller. Depuis, elle dort toujours. Micheline se figure le coma comme un abîme sans fond, sans fin, sans foi. Une absence d’être, un néant tentaculaire.

Tout dans ce thriller psychologique tourne autour de Jeanne, le personnage principal, qui est dans le coma. Je me suis beaucoup renseignée sur ce qu’est le coma. Pour écrire et décrire, je dois me mettre dans la peau de personnes qui connaissent le coma. J’ai rencontré un homme qui est resté dans le coma pendant 3 semaines et, surtout, j’ai rencontré sa famille, sa maman, sa compagne et son frère. Ce qui a été d’une richesse inouïe. Ils étaient calés sur le sujet mais ils ont gardé cette approche humaine. Même s’ils connaissaient les réponse aux questions :  est-ce qu’on s’en sort ou pas, quelles sont les chances, que ressent-il,… J’ai dû me mettre à leur place-là pour décrire avec précisions ce qu’éprouvent mes personnages.

Penser aux vivants, ce n’est pas ton truc. Ton truc à toi, ce sont les morts. Et tu t’étonnes que ton ventre ressemble à un cimetière !

Oui, j’ai un faible pour les familles dysfonctionnelles. Ne croyez pas que ce soit une catharsys, J’ai grandi dans une famille harmonieuse.  Ma maman, qui était très jeune quand elle m’a eue et qui s’est séparée quand j’avais 3 ans,, s’est remise en ménage avec un homme formidable. J’ai grandi avec ma maman qui est tout amour et bienveillance. En revanche, il est bien plus intéressant de mettre en scène des familles qui ont des secrets, qui se déchirent,…  Mais au départ, elles sont normales, ensuite il y a le grain de sable qui vient gripper la machine et démontre toute la complexité des rapports humains.

En vérité, leur mère ne l’aime pas, elle, Charlotte. Elle ne peut pas l’aimer. De le savoir enfin, d’en comprendre la raison surtout, ça la laisse pantoise, un peu tremblante, comme si elle venait de subir une intervention chirurgicale, l’ablation d’une tumeur maligne : elle sent qu’on lui a enlevé quelque chose, une partie d’elle-même, dont elle soupçonne pourtant que l’absence lui sera bénéfique

L’amour maternel est le premier amour que l’on reçoit, il est fondamental.  En être privé cela laisse des traces. Micheline, l’un de mes personnages, est une femme bien comme il faut, mais elle aime plus l’une de ses deux filles, Jeanne qui est dans le coma. Charlotte, l’aînée, a toujours ressenti que sa mère préférait sa sœur, mais sans comprendre pourquoi. Quand elle apprend le secret familial, elle comprend enfin l’origine de cette préférence Jeanne est l’enfant de l’amour, elle ne l’est pas. Tout ça est très intéressant et c’est un beau terrain de jeu pour moi. Si je veux mettre à mal mes personnages, les confronter et créer des tensions,… J’essaye de toucher les lecteurs par l’émotion, la psychologie, les relations, bien plus que par des actions musclées.

Et les vivants autour, Barbara Abel, Belfond Editions, 19 €.