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Rêveries du promeneur solitaire, Jean-Jacques Rousseau, Le livre de Poche, 2,90 Euros.

Pensée de la semaine
Rousseau et le chien fou

Simon Brunfaut -

Le jeudi 24 octobre 1786, Rousseau se retrouve les quatre fers en l’air et la tête dans les étoiles selon un étrange morphing de Jolly Jumper et de Youri Gagarine. Alors qu’il marche tranquillement dans Ménilmontant, il aperçoit un gros chien. La bête, peu au clair sur le contrat social et les règles élémentaires de citoyenneté, se rue sur le pauvre Jean-Jacques. Bien que ses mollets tremblent dans ses bas blancs, le philosophe a un éclair de génie sous sa perruque ronde. N’ayant plus le temps d’effectuer un pas de côté pour éviter le sauvage canidé, il opte pour une solution digne de Dick Fosbury : il décide de sauter à pieds joints au-dessus du cerbère afin que ce dernier passe sous lui. Mais hélas, Jean-Jacques n’a pas le temps de mettre son plan à exécution puisque l’animal vient le heurter de plein fouet. On le croit mort (Jean-Jacques, pas le chien). Le tout Paris s’émeut. Un journal réclame le nom de l’animal. On crie vengeance, on promet une rançon, on s’empresse de placarder un avis de recherche : on s’arme contre les fox-terriers, les labradors et autres yorkshires. Voltaire, qui n’est pas à une raillerie près au sujet de Rousseau, réagit de manière fataliste :

 

C’est peu de chose qu’un philosophe.

 

Par ces temps où l’on observe de plus en plus d’hommes rampant à hauteur de teckel devant certains jouant au dogue allemand, on saura apprécier à sa juste valeur ce constat en rappelant au lecteur de toujours tenir son caniche nain en laisse à l’approche d’un grand penseur, tout en laissant les autres caresser le rêve de parler d’amour aux animaux qui ont le courroux poilu et mal brossé.

 

Rêveries du promeneur solitaire, Jean-Jacques Rousseau, Le livre de Poche, 2,90 Euros.